
Dans un article daté Montréal, 9 novembre 1951, paru dans le Globe and Mail, on peut y lire que M. St. Laurent a prononcé un discours devant le Collège Macdonald et l’université McGill, intitulé ‘ Voilà ce qu’est la nation du Canada’. Il y dit notamment que « la véritable unité n’entraîne pas l’asservissement de citoyens particuliers à un moule commun prescrit par un état omnipotent ». Et pourtant, si cela ne décrit pas précisément la position qu’occupent les homosexuels du Canada, je ne saurais alors dire ce qui la décrit. Un peu plus loin, le Premier ministre déclare que chaque Canadien et Canadienne devrait insister auprès des diverses minorités sur le fait que leurs droits seraient sauvegardés. Et il ajoute par ailleurs « Je tiens à répéter ma conviction selon laquelle cela est déjà vrai, mais nous savons pertinemment que telle n’est pas la position d’un grand nombre de nos concitoyens et concitoyennes ». Quiconque pourrait assurer au Premier ministre qu’il aurait bien du mal à garantir la validité de sa conviction envers les homosexuels du Canada. Nous avons ici un groupe minoritaire dont les droits ne sont pas protégés mais, pire encore, qui ne jouit d’aucun droit de protection dans les circonstances actuelles. (Traduction)Quand Egan commença à s’afficher publiquement, plusieurs personnes furent terrifiées. En 1960, il était peu courant de se prononcer publiquement sur l’homosexualité, l’homophobie n’étant pas encore un concept du fait que les hétérosexuels étaient dans l’ignorance de tout ce qui entourait cette communauté LGBTQ2+. La population canadienne n’était pas vraiment au courant de l’existence d’homosexuels, ce qui souleva beaucoup de peur et de haine de la part des communautés LGBTQ2+ étant donné que Jim avait maintenant publiquement exposé les vrais faits et gestes de ces gens sans vraiment se douter des conséquences que cela pourrait avoir. À l’époque, son amant de longue date se nommait Jack Nesbit. En se mettant ainsi sous les feux des projecteurs, Jim devint de plus en plus associé à l’homosexualité, et les gens le reconnaissaient. Plusieurs enjeux mirent à l’épreuve sa relation avec Jack, ce à quoi il faut ajouter les dérangements incessants de la part d’inconnus sur leur ligne téléphonique. Ils décidèrent alors de s’isoler à la campagne pendant 20 ans afin de laisser la poussière retomber. En 1987, tout changea. C’est à ce moment que Jim et Jack décidèrent de se battre pour leurs droits :
Le couple décida de faire référence à la Charte canadienne des droits et libertés pour contester le non-versement des prestations de retraite aux couples de même sexe. Huit ans plus tard, après d’interminables audiences et autres appels infructueux, leur demande devint la première portant sur les droits des gais à être entendue par la Cour suprême du Canada en vertu de la Charte. Certes, ils perdirent par cinq voix contre quatre, mais la Cour jugea parallèlement que l’article sur les droits à l’égalité de la Charte devrait désormais inclure l’orientation sexuelle. Cela ouvrit la voie à de futures affaires à gagner, et aux énormes gains juridiques réalisés par les personnes LGBTQ dans les décennies à venir[1].En somme, Jim Egan et Jack Nesbit ont marqué l’histoire canadienne. Les deux hommes sont décédés en 2000, Jim à 79 ans et Jack à 72 ans. Les mémoires de Jim ont été publiées dans le livre Challenging the Conspiracy of Silence: My Life as a Canadian Gay Activist. En plus, un documentaire a été réalisé en 1995 pour rendre honneur à l’amour qu’ils se portaient : Jim Loves Jack. Jim Egan a marqué l’histoire avec ses écrits et sa bataille pour les droits de la communauté LGBTQ2+.

[1] https://www.cbc.ca/arts/proudly-prep-some-tissues-the-first-lgbtq-heritage-minute-celebrating-activist-jim-egan-is-here-1.4703287