Avec plus de 500 dossiers du genre traités par les corps policiers canadiens en 2019, une hausse de 44% par rapport à l’année précédente, la situation préoccupe grandement le Comité permanent de la Condition féminine et le Groupe parlementaire multipartite contre l’esclavage moderne et la traite des personnes, tous deux ayant pour vice-présidente la députée de Shefford, Andréanne Larouche[2].Cette hausse constitue un record depuis 2009. Deux scénarios hypothétiques ont été pensés par des experts pour expliquer cette croissance : une augmentation réelle de la traite de personnes ou une meilleure efficacité des policiers dans les interventions de ces situations. L’Ontario est la province qui retrouve près des 2/3 des interventions, et 10% sont à Montréal, ce qui constitue en moyenne 75% dans ces deux provinces. La majorité, soit 95%, sont des femmes et des filles âgées de 18 à 24 ans principalement.
« On sait qu’il y a un corridor qui relie le Québec à l’Alberta. Les femmes sont extirpées de leur milieu et sont emmenées loin de chez elles, là où elles ne connaissent personne et où elles sont souvent confrontées à une barrière linguistique. Elles perdent alors leurs repères et elles sont encore plus vulnérables face à leur agresseur », affirme la députée de Shefford, Andréanne LaroucheIl convient de souligner qu’une grande majorité des victimes touchées par ces crimes sont les femmes des Premières Nations. « Selon la plateforme Cliquez Justice, ces femmes comptent pour 30 à 50% de toutes les victimes de trafic humain au Canada[3] ». Le rapport du comité responsable d’enquêter sur les femmes autochtones assassinées ou disparues est toujours en attente. Qui sont les auteurs de ces crimes ? Environ 83% sont des hommes âgés de 18 à 34 ans. Une fois sur trois, il connaissait personnellement leur victime.
Les trafiquants de personnes font rarement face aux conséquences de leurs actes, révèle le rapport de Statistique Canada: dans neuf cas sur dix recensés en 2018-2019, les accusations portées au criminel contre les auteurs présumés de la traite de personnes n’aboutissent pas en condamnation; elles se sont plutôt soldées par un arrêt, un retrait, un rejet ou une absolution[4].

Reconnaissant la difficulté de fournir des chiffres exacts, le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken a précisé que les estimations situaient à 25 millions le nombre de personnes victimes de ce type de trafic, qui inclut la prostitution forcée, et celle des mineurs, ainsi que le travail forcé. En Inde et au Népal, certaines « jeunes filles venant de régions pauvres et rurales (…) ont été forcées à se marier pour aider leurs familles ». « Aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Uruguay, des récits montrent que des propriétaires ont forcé leurs locataires (souvent des femmes) à avoir des relations sexuelles avec eux s’ils/si elles ne pouvaient plus payer leur loyer. » «En Haïti, au Niger et au Mali, des bandes opérant dans les camps de personnes déplacées à l’intérieur de leur pays ont profité de la baisse de la sécurité et des protections pour forcer les résident(e)s à se soumettre à des actes sexuels payés[5]. »Une liste noire aux États-Unis a été créée citant les pays qui ne répondent pas aux critères minimums de lutte contre le trafic d’êtres humains et ne font pas suffisamment d’efforts pour y parvenir. Prenons exemple sur la Turquie qui ne figure pas sur cette liste noire, mais a été épinglée pour avoir « recruté et utilisé des enfants soldats en Syrie et en Libye[6]. » La pandémie a été définie comme un « environnement idéal » pour le trafic d’êtres humains. L’esclavage sexuel est une partie très importante dans la traite de personnes. La pornographie est désormais sur divers médias. Le type de porno auquel nous avons accès aujourd’hui devient de plus en plus violent. Il a été prouvé par des recherches que les personnes qui regardent fréquemment de la pornographie font souvent preuve de moins de compassion envers les victimes d’exploitation, d’abus et de violence sexuelle. Des vidéos de viols, d’abus et de trafic sexuels sont disponibles en abondance sur ces sites.
Les pornographes se livrent souvent au trafic sexuel et ont recours à des esclaves sexuel(le)s pour produire des vidéos. C’est le moyen le plus simple pour eux de doubler leurs revenus. Une victime de trafic sexuel ne va pas faire tourner la caméra ni télécharger toutes ces vidéos et images d’elle-même. Souvent, même si la victime est mal à l’aise ou forcée d’agir, vous ne pourrez même pas le dire en raison des thèmes largement violents. Le viol est en plein essor en ce moment[7].Le trafic sexuel moderne est principalement relié à la pornographie. Pornhub, un site de pornographie basé à Montréal et exploité par la société MindGeek, a fait face à des allégations de trafic sexuel en 2020 « pour avoir hébergé des vidéos démontrant des crimes sexuels de masse, comme le viol, la traite, la maltraitance et l’agression d’enfants, et d’en avoir tiré des profits[8] ». Ce site compte 42 milliards de visites et six millions de vidéos téléchargées par année. Une lettre a été envoyée au premier ministre Justin Trudeau afin « d’enquêter sur Pornhub et MindGeek pour des raisons de complicité présumée dans la traite et la maltraitance d’enfants à des fins sexuelles [9]». Plus récemment, en juin 2021, un article a été publié dans Le Devoir pour faire suite à cette histoire. Maintenant, plus d’une « trentaine de femmes de plusieurs pays poursuivent la compagnie Pornhub, dont le siège social est à Montréal, pour avoir exploité des vidéos dans lesquelles elles se faisaient violer ou pour lesquelles elles n’avaient pas donné de consentement à la publication.[10] » Ces femmes ont été violées. Ceci n’est pas de la pornographie.
Certaines ont dû engager un avocat. D’autres ont dénoncé la situation à la police, ce qui a mené, dans certains cas, à des arrestations de prédateurs sexuels. Humiliées et harcelées, certaines ont dû déménager, changer d’école ou quitter leur emploi. Certaines ont fait des tentatives de suicide. Toutes ont gardé des séquelles importantes de cette expérience traumatisante[11].Une vidéo a été publié sur YouTube concernant la pornographie, présentée par Gail Dines, qui explique la hausse de la pornographie durant la pandémie (disponible en anglais seulement) : Toutes les victimes ont accès à la ligne gratuite 24 heures sur 24 1 833 900-1010. Les personnes ayant une déficience auditive ou visuelle doivent composer le 711, puis demander au service de relais de les connecter à la ligne téléphonique. Un site Internet a été conçu pour être accessible aux aveugles et aux malvoyants. Il faut défendre leur dignité humaine. Il faut écouter les victimes pour aider à contrer la traite de personnes.
[1] https://www.lavoixdelest.ca/actualites/un-premier-portrait-preoccupant-du-trafic-humain-au-canada-12eb4f78620c63ed1960c45ca5f723ec [2] https://www.lavoixdelest.ca/actualites/un-premier-portrait-preoccupant-du-trafic-humain-au-canada-12eb4f78620c63ed1960c45ca5f723ec [3] https://www.lavoixdelest.ca/actualites/un-premier-portrait-preoccupant-du-trafic-humain-au-canada-12eb4f78620c63ed1960c45ca5f723ec [4] https://www.lavoixdelest.ca/actualites/un-premier-portrait-preoccupant-du-trafic-humain-au-canada-12eb4f78620c63ed1960c45ca5f723ec [5] https://www.tvanouvelles.ca/2021/07/01/le-trafic-detres-humains-sest-developpe-grace-a-la-pandemie-deplore-washington-1 [6] https://www.tvanouvelles.ca/2021/07/01/le-trafic-detres-humains-sest-developpe-grace-a-la-pandemie-deplore-washington-1 [7] https://blockerx.net/fr/blog/la-vile-connexion-entre-le-porno-et-le-trafic-sexuel/ [8] https://www.journaldemontreal.com/2020/11/27/enquete-reclamee-sur-le-site-pornographique-pornhub-1 [9] https://www.journaldemontreal.com/2020/11/27/enquete-reclamee-sur-le-site-pornographique-pornhub-1 [10] https://www.ledevoir.com/societe/611826/mindgeek-la-societe-mere-de-pornhub-est-visee-par-une-poursuite-aux-etats-unis [11] https://www.ledevoir.com/societe/611826/mindgeek-la-societe-mere-de-pornhub-est-visee-par-une-poursuite-aux-etats-unis